Canada : Celui qui découvrait l'Acadie
04 nov. 2016Mais qui sont les Acadiens ?
En 1632, une cinquantaine de familles françaises quittent le royaume de France et partent du Poitou pour fonder l'Acadie et donner naissance à l'une des civilisations les plus originales d'Amérique du Nord.
S'installant d'abord dans la baie de Fundy, puis dans ce qui est aujourd'hui la Nouvelle-Écosse, ces immigrés bénéficient de riches terres à cultiver et obtiennent des rendements supérieurs à ceux de la France et du Québec.
Livrés à eux-mêmes par la France, ils réussissent rapidement à pratiquer l'autosuffisance.
Ce peuple totalement neutre dans les conflits de territoires entre la France et l'Angleterre, vivra plusieurs années heureux et en osmose avec la nature, jusqu'à ce que les batailles entre les français et les anglais ne reprennent de plus belle et les chassent de leur territoire.
Nous y reviendrons plus en détail au cours de l'article.
Jour 89 : samedi 17/09/2016
Après avoir roulé un peu moins d'une heure au sud ouest d'Halifax, nous voici arrivés à Peggy’s Cove, un minuscule village de pêcheurs d'une soixantaine d'habitants.
Un peu avant 19h, nous allons marcher sur les rochers et prendre quelques photos d'un coucher de soleil finalement moins extraordinaire que nous pensions, les nuages le rendant plus discret et moins lumineux.
Beaucoup de monde malgré tout sur les lieux, mais cela ne nous empêche pas de bien nous amuser 😉
Nous nous sentons tellement mieux ici qu'à Halifax.
C'est sur le parking situé à côté du phare que nous passons la nuit.
Pris d'un regain de motivation pour la rédaction de notre blog, nous nous couchons assez tard.
Jour 90 : dimanche 18/09/2016
Levés tard évidemment, nous trainons un peu en matinée avant de reprendre la route vers 12h30 pour le village de Lunenburg, situé à environ 1h de voiture.
En chemin, nous nous arrêtons à Mahone Bay, un petit village blotti au fond de la baie et dans lequel demeurent le long du front de mer, de vieilles maisons aux allures un peu hantées, ainsi que trois églises côte à côte : une église anglicane, une église luthérienne et une troisième dont nous n'avons pas su à quel courant religieux elle appartient.
Rien de spécial à faire dans ce village mais que nous trouvons toutefois très mignon avec ses façades colorées et son ambiance automnale, toutes ces citrouilles, épouvantails et poupées de chiffon disposés un peu partout dans les rues.
Beaucoup de restaurants aussi
J'aimerais bien profiter d'être en bord de mer pour manger un véritable “fish and chips” comme Guigui a pu goûter à Terre-Neuve, mais ici c'est un peu cher, donc j'attendrai de trouver une meilleure place.
Une petite pause sur le port où nous remarquons plusieurs petits salons flottants installés sur des radeaux.
10 km plus loin, nous arrivons à Lunenburg, une ville habitée par les Acadiens jusqu'au milieu du 18e siècle.
Nous nous rendons de suite au centre de visiteurs prendre différentes informations.
Puis, à raison de 3,45$ chacun, nous prenons une bonne douche chaude dans le camping situé juste en face.
Une fois la pluie cessée, nous allons nous promener en fin de journée dans la vieille ville de Lunenburg.
Le bateau nommée le Bluenose 2 et que l'on retrouve sur les pièces de 10 sous, est arrivé à quai cet après-midi et il est possible de le visiter gratuitement.
C'est ce que nous faisons rapidement, question de nous occuper un peu, mais on ne peut pas dire que cela nous fascine beaucoup…
La vieille ville est vraiment très très petite.
Une rue principale où se trouvent tous les restos mais aussi une charmante ruelle aux maisons colorées.
Pour le souper, nous allons manger au Knot Pub, un bistrot recommandé par l'employée du centre de visiteurs, et dans lequel on y mangerait d'excellents fish and chips pour pas cher.
D'après elle, c'est dans ce pub que les locaux aiment se retrouver.
L'ambiance et la déco locales sont effectivement bien présentes.
Pas cher, ça c'est bien vrai.
Nous payons 50$ taxes et pourboires compris (environ 35€) pour deux boissons, deux plats et un dessert que nous partageons.
Et franchement, je me régale avec mon gros fish and chips.
Guigui lui, n'est pas non plus mécontent de son burger à la choucroute, un jamais vu jusqu'à aujourd'hui, pas même en Alsace 😉.
Et qui dit burger et choucroute, dit une bonne binouze pour mon pti coeur, servie dans un verre plutôt rigolo.
Le repas terminé, nous sommes repus.
Nous roulons pendant 5 km afin de sortir de la ville et nous trouver un endroit où dormir.
Nous stationnons sur le bord d'une petite route peu passante et pas du tout éclairée.
Nous devrions passer une bonne nuit.
Jour 91 : lundi 19/09/2016
Ce matin, nous roupillons jusqu’à 10h.
Dehors il pleut et nous aurons ce temps toute la journée.
Pas grand chose à faire par temps de pluie, surtout dans un mini-van, alors nous passons la journée entière au café Tim Hortons.
Au programme : du blog, du tri et sélection de photos, de la lecture sur internet et une étude de l'itinéraire de nos prochains jours.
Nous ne faisons que changer de programme tout le temps.
Jour 92 : mardi 20/09/2016
Aujourd'hui, nous prenons la route pour Grand-Pré, LE village qui a marqué l'histoire des Acadiens, en bien comme en mal.
Sur ce site historique, nous commençons la visite par le visionnage d'un film de 22 minutes racontant l'histoire de ce peuple acadien, de leur installation à Grand-Pré jusqu'à leur déportation.
Un film très intéressant et bien conté, qui nous permet de mieux comprendre l'histoire de ces canadiens-français, à un moment de notre voyage où nous nous demandions justement qui étaient ces gens.
L'histoire, la voici.
Une cinquantaine de familles françaises partent du port de la Rochelle en 1632 pour découvrir et tenter une vie meilleure outre-atlantique.
C'est en Nouvelle-Écosse qu'ils s'installent et à Grand-Pré plus particulièrement.
A Grand-Pré, la marée peut monter très haut, apportant énormément de nutriments et minéraux aux terres avoisinantes.
Ces marais salés ne permettent pas de cultiver.
Mais c'est sans compter sur l'ingéniosité des Acadiens.
Pour pouvoir exploiter ces terres naturellement riches et bonnes pour la culture, les Acadiens construisent d'une part une digue permettant d'assécher les marais, et un aboiteau d'autre part, qui permet de faire sortir l'eau de la rivière sans pour autant laisser entrer l'eau de la mer lors des marées montantes car cela détruirait les cultures.
Une fois les marais asséchés, les Acadiens peuvent cultiver en quantité fruits, légumes et céréales, d'où le nom de Grand Pré donné au village, en référence à une ferme géante.
Un peu abandonnés par la France, les Acadiens réussissent à vivre en autosuffisance et leur rendement est même bien supérieur à celui de leur pays d'origine.
l'Acadie naît, donnant ainsi naissance à une civilisation absolument originale.
Premier coup dur pour ce peuple autonome en 1713, quand la France cède l'Acadie aux anglais
Elle s'appelle désormais la Nouvelle-Écosse.
Les Acadiens réussissent à négocier avec les anglais une entente leur permettant de garder leurs terres et de pratiquer leur religion catholique en toute liberté. Ils obtiennent même la neutralité dans les conflits franco-anglais, ceux-là mêmes souhaitant simplement vivre une vie paisible dans leur village.
Bien que les Acadiens ne désirent pas se lier d'amitié avec les français comme avec les anglais, ces deux nations toujours en guerre l'une contre l'autre, ils établissent toutefois de très bonnes relations avec les Mic’maq, l'un des peuples autochtones de l'Amérique du nord.
En effet, une relation pacifique s'installe entre ces deux populations qui, au lieu de se disputer un territoire, préfèrent apprendre les uns des autres, s'entraider, vivre ensemble tout simplement.
Acadiens et Mic’maq avaient en réalité déjà tout compris sur que signifie “vivre en paix”...
Deuxième coup dur pour les Acadiens en 1744, avec des anglais qui les obligent à prêter serment d'allégeance à la couronne, ce qui signifie qu'ils devront prendre les armes et se battre contre les français.
En clair, il faudra obéir aux ordres.
Les Acadiens, qui ne veulent prendre ni les armes ni parti pour les français ou les anglais, refusent de signer ce serment car ils souhaitent conserver leur neutralité dans ces conflits et vivre seulement de leurs terres.
Bref, ils n’emmerdent personne et ne veulent pas se faire emmerder.
Et nous les comprenons parfaitement.
Mais en 1755, le gouverneur de la Nouvelle-Écosse se voit obligé, sous les ordres de la couronne, d'expulser les Acadiens de leurs terres et de les déporter à droite et à gauche, sur les différents territoires anglais de l'époque.
Beaucoup de ces Acadiens se voient séparés de leur conjoint et de leurs enfants, envoyés de force pour l'exil en tant que prisonniers en Angleterre, ou déportés dans les états de la côte nord-est de la Nouvelle-Angleterre (les États-Unis d’aujourd'hui), dans le Maine et le Massachusetts, où les Acadiens se font rejeter par les populations locales.
Du coup, ils reviennent en France malgré eux, notamment en Bretagne, tandis que d'autres échouent en Louisiane et deviennent par la suite des “Cajuns”.
D'autres Acadiens trouvent refuge chez les amerindiens du Nouveau Brunswick ou en Gaspésie.
En 1763, tout le Canada est cédé à l'Angleterre mais les Acadiens survivants sont autorisés à rester sur leurs terres d'accueil, à savoir sur l'île du Prince Édouard, mais surtout au Nouveau Brunswick qui devient la nouvelle terre acadienne.
Aujourd'hui, le Nouveau Brunswick est la seule province canadienne qui soit officiellement et réellement bilingue.
Grâce à leurs traditions familiales et religieuses, les Acadiens réussissent à préserver leur langue (le français) et leur identité.
Ils adoptent même le drapeau français orné d'une étoile jaune dans le bleu, que l'on voit accroché partout aux maisons des alentours et en Nouvelle-Écosse d'une manière générale.
Pendant la déportation, beaucoup de familles et de couples sont séparés, meurent de famine, de maladie ou de noyade en mer quand les bateaux échouent.
Des enfants sont forcés à travailler pour seulement quelques pièces ou un morceau de pain.
À l'époque, les anglais comme les français, achetaient des esclaves noirs venus des îles et de l'Afrique.
Certes, ces esclaves ne sont pas super bien traités et surtout privés de leur liberté, mais ils restent toutefois bien nourris car ils doivent être efficaces pour réaliser tous les travaux difficiles, notamment dans les champs.
Les esclaves noirs sont littéralement un investissement.
Bref, le statut d'esclave n'est déjà pas terrible, mais les Acadiens ont un statut encore pire que les noirs.
En effet, n'étant pas achetés mais donnés de force aux colons, ils sont forcés de travailler sans pour autant être bien traités.
Mal nourris, mal entretenus, mal soignés, les colons les laissent mourir comme des chiens.
Après avoir visionné ce film vraiment très intéressant au sujet de ce “Grand Dérangement” comme ils disaient à l'époque pour parler de la déportation, nous partons nous promener dans les jardins de Grand-Pré.
Et nous rencontrons ensuite François, l'un des guides de ce lieu, lui-même d'origine acadienne.
Nous discutons un long moment avec lui de cette période tragique qu'ont connu ses ancêtres.
Puis il nous donne quelques infos intéressantes sur des lieux sympas où nous pourrions passer l'hiver dans le cadre de notre PVT.
Selon lui, Moncton au Nouveau Brunswick serait un bon choix. Affaire à suivre…
Et vers 16h, nous terminons la visite de ce lieu historique devenu une sorte de pèlerinage pour les Acadiens d'aujourd'hui.
Nous avons beaucoup aimé cette visite car elle nous a permis de mieux comprendre l'histoire de tout un peuple, initialement nos ancêtres français.
Malheureusement, ce genre de lieu nous rappelle que depuis toujours l'être humain passe son temps à faire la guerre et à mettre à mal les populations les plus démunies.
Ces déportations, ces peuples cherchant un endroit paisible où s'établir, nous font beaucoup penser à ce qu'il se passe actuellement en Europe.
Et c'est bien triste de constater qu'après des siècles passés, rien n'a évolué.
Enfin bref !
Petite pause casse-croûte et nous reprenons la route vers le nord, en direction d'une nouvelle province canadienne : l'île du Prince Édouard.
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