Canada : Celui qui pelletait de la neige
31 déc. 2016Novembre 2016
Une fois n'est pas coutume, ce n'est pas Jenni qui rédige cet article... en même temps cela me concerne plus particulièrement ;)
Contrairement à ce qu'on pensait au début, trouver un travail ici n'est pas si facile.
Ça l'est sûrement plus à Montréal et peut-être aussi à Québec, mais au Saguenay le marché du travail n'est pas idéal.
En fait c'est un peu comme en France : sans expérience, pas de job.
La région n'est en effet pas la plus dynamique de la province et on subit beaucoup plus la loi de l'offre et de la demande.
Pour un emploi proposé, nous sommes nombreux à postuler et c'est donc l'expérience qui fait la différence.
Même pour un job de 15 jours à étiqueter des articles pour une entreprise forestière, je me suis fait recaler car je n'avais pas d'expérience dans le domaine industriel... pour étiqueter des articles :/
De plus les "entretiens" sont souvent déroutants et même si on a l'impression que ça c'est bien passé, ça n'est pas forcément le cas. On a parfois l'impression que la personne en face est un peu hypocrite, ou en tout cas moins franche que les employeurs français auxquels j'ai été confrontés.
J'avais par exemple postulé pour un poste de serveur dans un restaurant de sushis en plein centre-ville, à 10 minutes à pieds de l'appart.
L'entretien se passe bien, la responsable me demande si ça me dérangerait de faire aussi sushiman (cuisinier pour sushi) en précisant que ne pas avoir d'expérience est parfois un plus pour être formé comme ils l'entendent, et qu'un autre restaurant de la même enseigne recherche aussi un cuisinier. Elle me dit qu'elle en parlera à l'autre responsable quand elles iront à Québec en fin de semaine et me rappellera en début de semaine suivante pour me donner une réponse.
Je rentre donc assez confiant en me voyant déjà préparer des sushis, à la grande joie de certaines qui me verraient bien en rapporter à l'appart de temps en temps :)
En début de semaine suivante, n'ayant pas de retour, je passe au restaurant voir la responsable qui me tient un tout autre discours : finalement, elle n'est pas pressée car elle ne cherche que pour début décembre (on est alors début novembre) et n'a pas parlé à l'autre responsable, mais elle la reverra à la fin de mois... bref j'attends toujours son retour ! (On a même mangé récemment dans ce restaurant, servi par cette même responsable : aucune réaction).
Autre situation, toujours pour du service mais cette fois-ci en banquet. Le boss me contacte un jour en me disant qu'il aurait besoin de moi pour un banquet le soir même. Super ! 🙂
Il me rappelle moins de 5 minutes plus tard en me disant qu'il a finalement pu joindre une autre personne ayant plus d'expérience qui est disponible pour ce soir... un peu limite comme comportement (et je passe le fait qu'il était déjà censé me contacter 2 ou 3 semaines plus tôt et que j'étais prêt à acheter des vêtements pour ce job, ce que je n'ai pas fait heureusement).
J'ai postulé à pas mal d'offres pour tout type de job mais je n'ai eu que très peu de retour.
C'est finalement une entreprise multiservices qui m'a contacté pour un emploi de pelleteur de neige courant novembre.
Comme métier pour un français venu passer l'hiver au Québec, on ne peut pas faire plus cliché ! 🙂
J'accepte car de toutes manières je n'ai pas d'autres opportunités.
Mais le hic c'est que c'est un emploi "sur appel" et qu'il ne neige pas encore donc pas de travail (et donc pas de paye).
Comme l'entreprise ne fait pas que du déneigement, ils m'ont tout de même fait travailler quelques heures sur d'autres tâches.
J'ai du par exemple démonter des barres de fer permettant de vérouiller des containers de recyclage et les remonter sur d'autres (ne me demandez pas pourquoi...).
Ici ils disent démancher des barrures 🙂.
Pas facile à capter surtout quand on bosse avec un pur saguenéen de Bégin qui a un bon accent pour un jeune. Mais Franck a bien insisté pour que je le fasse répéter quand je ne comprends pas, bien conscient qu'il n'articule pas beaucoup :)
Autre boulot, toujours avec cette même entreprise : défricher une parcelle abandonnée derrière un concessionnaire, retirer les cutters et aplanir le terrain.
Que sont les "cutters" me direz-vous ?
Et bien grâce à Jérôme (notre ami québécois), j'ai pu me sentir moins con quand on m'a présenté la job (oui, ici ce mot est féminin) car il nous en avait parlé quelques jours avant.
Ce qu'ils appellent ici "cutters", ce sont des bornes en béton. D'après les explications de Jérôme, cela viendrait de l'époque où les francophones travaillaient avec des anglais qui indiquaient la mention "cut here" (coupez ici) entre les bornes lors de leur confection. Mais les français et leur légendaire talent en anglais ont simplement lu les indications”à la française” 😉.
En tout cas, cette job m'a permis de conduire mon premier pick-up ! :)
Puis la neige est enfin arrivée à la fin novembre, et les heures de travail avec.
Dans mon équipe nous étions trois mais sommes maintenant plus que deux. Nous devons déneiger à la pelle et sabler/saler les portes d'entrées, issues de secours et trottoirs de 13 petits hôpitaux ou centres d'hébergements de la ville.
C'est la plupart du temps un travail de nuit car il faut que tout soit dégagé le matin vers 6h30-7h avant l'arrivée des employés.
Mais comme la neige ne tombe pas que la nuit, on doit parfois sortir en journée pour que tout soit propre à l'heure du souper (le dîner en France).
C'est un travail qui le change du boulot de bureau en France, mais ça me plaît car ça me fait découvrir autre chose, je suis dehors et c'est pas prise de tête.
Par contre, c'est très physique et le rythme est assez fatigant car mon cycle de sommeil est saccadé (4h de sommeil par-ci par-là), mais pour le moment c'est plutôt le fun comme job (sauf quand le vent se lève, là ça peut former des congères assez difficiles à déblayer, et en plus le vent ça fouette le visage, d'où mon équipement 😉).
Et quand il se met vraiment à neiger, ça s'accumule assez vite, surtout si le vent s'y met !
Parfois, en rentrant tôt le matin, je peux observer un magnifique phénomène de brume sur la rivière Saguenay.
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