Canada - Celui qui effectuait le trek de Grizzly Lake
13 mars 2019Après avoir exploré le parc territorial Tombstone à travers cinq randonnées à la journée, nous partons désormais en expédition de cinq jours sur le trek Grizzly Lake, toujours situé dans le parc Tombstone, et relativement emprunté, du moins jusqu'à la première étape qui mène à Grizzly Lake.
Notre programme pour ces cinq prochains jours, le voici :
Jour 1 → 12 km jusqu'à Grizzly Lake
Jour 2 → 12 km jusqu'à Talus Lake
Jour 3 → exploration autour de Talus Lake + 6 km jusqu'à Divide Lake
Jour 4 → 6 km pour retourner à Grizzly Lake + exploration autour de Grizzly Lake
Jour 5 → 12 km pour retourner à la voiture
Au total, nous allons parcourir une cinquantaine de kilomètres en cinq jours, avec des sacs chargés à bloc en nourriture pour une expédition en autonomie.
Lorsque nous partons comme ça en pleine montagne et en totale autonomie sans possibilité de ravitaillement, nous nous assurons toujours d'emporter un peu plus de nourriture qu'il ne le faut, au cas où, pour une raison ou pour une autre, nous serions obligés de rester plus longtemps sur le trek.
Allez, c'est parti !
Jour 726 : vendredi 27/07/2018
Étape 1 : Grizzly Lake
Distance : 12 km
Dénivelé cumulé positif : 870 mètres
Point le plus bas : 920 mètres d'altitude
Point le plus haut : 1715 mètres d'altitude
Durée : 6h (nombreuses et longues pauses incluses)
Comme chaque matin, nous rencontrons quelques difficultés à nous lever à l'heure prévue et ce n'est qu'à 10h45 que nous entamons le début du trek. La première étape étant pas mal empruntée, ce n'est pas plus mal de commencer tardivement, ainsi nous évitons le monde sur le sentier. Ce ne sont pas moins de dix personnes que nous avons vues emprunter le sentier avant nous ce matin.
La rando commence dans le bois avec une montée assez progressive. Nous dépassons un premier couple, à l'allure peu randonneuse. Lui, marche avec la clope au bec (merci pour l'odeur) et elle, semble souffrir du poids de son sac à dos. Un peu inquiets de ne pas les voir arriver sur le camp de Grizzly Lake en fin de journée, nous apprendrons qu'ils ont abandonné la randonnée et préféré retourner à leur voiture, la rando se montrant trop difficile pour Madame. Visiblement, c'était la première fois que cette dame randonnait de toute sa vie, ce qui nous appelle à nous demander : pourquoi effectuer un trek de plusieurs jours quand on n'est pas en forme et que l'on randonne pour la première fois ? Hormis le fait que ce soit dangereux, c'est surtout un bon moyen de se dégoûter de la randonnée.
Enfin bref !
Nous continuons notre ascension toujours plus raide encore, le sentier sortant du bois pour nous ouvrir la vue sur le paysage.
C'est dans la montée, quand il faut monter bien haut les jambes pour gravir ces énormes marches, que nous ressentons le poids du sac. Aïe aïe aïe ! Mais on s'accroche, surtout que cette montée sera la seule grosse difficulté de la journée.
Le temps est humide aujourd'hui. Nous avons même eu droit à quelques gouttes.
Cette humidité couplée à la chaleur ajoute de la difficulté à la rando, si bien que nous transpirons comme des porcs. Nous sommes trempés de sueur, essoufflés par l'ascension et nos mollets, nos cuisses ainsi que nos fessiers nous brûlent tant l'effort que nous fournissons est intense.
Ce sont au total près de 800 mètres que nous grimpons en seulement cinq kilomètres.
Sur le sentier, nous croisons tout type de personne, faisant le chemin inverse depuis le camp. Nous rencontrons ce couple allemand sexagénaire qui m'inspire beaucoup et que j'admire d'effectuer encore des treks pareils à leur âge, mais également ces deux jeunes suisses trentenaires partis complètement à l'arrache sans réchaud ni tente ainsi que ce groupe de trois amis français.
Tous sont relativement en forme, et ils ont plutôt intérêt à l'être car c'est quand même un trek classé comme difficile.
La montée est certes fatigante mais elle nous offre des points de vue extraordinaires sur la Grizzly Valley.
Une fois en haut sur la crête, le sentier continue de monter et descendre de façon plus modérée, pour le plus grand bonheur de nos jambes .
Contrairement à ce que nous avons vécu ces derniers jours sur les randonnées hors sentiers que nous avons effectuées dans le parc, ici le sentier est assez bien marqué par des cairns ou de petits drapeaux jaunes. Le balisage au Yukon étant généralement assez rare, nous l'apprécions d'autant plus .
Il nous faudra marcher deux heures depuis le début du sentier pour arriver sur un beau plateau, parfait pour une pause casse-croûte.
Nous restons une bonne demie-heure dans cet environnement magnifique, entourés de chiens de prairie pas sauvages pour un sou. Ils s'approchent de nous, espérant récupérer quelques miettes de nos noix et pains aux herbes .
Nous nous apprêtons à repartir quand nous entendons soudainement un groupe de trois personnes gueuler au loin après leurs chiens (supposés être tenus en laisse soit dit en passant) partis à pleine balle courser des chiens de prairie.
Mais en voulant chasser les rongeurs, ces chiens ont effrayé un caribou dans la vallée, ce dernier n'ayant d'autre choix que de se diriger dans la direction opposée à celle du groupe, et ce, pour notre plus grande joie puisque nous le voyons surgir à seulement une dizaine de mètres de nous .
Qu'il est beau ! Et comme il a de grands bois !
Merci la vie de nous offrir ces quelques divines minutes si proches de ce majestueux caribou .
Le caribou disparu de l'autre côté de la vallée, nous poursuivons notre marche dans une large prairie où les marmottes s'amusent à prendre la pause pour les photos .
Qu'elles sont belles et tellement pas peureuses !
La prairie nous repose un peu les jambes bien que le poids du sac se fasse toujours sentir sur les trapèzes.
Une fois la prairie parcourue, le sentier commence tranquillement à redescendre et à mesure que nous perdons de l'altitude, nous apercevons le très beau lac Grizzly, encaissé dans les montagnes aux pics très aiguisés et pointus.
Le lac, et donc notre camp pour la nuit, ne semble plus très loin et pourtant, les derniers kilomètres sont interminables. Nos sacs nous paraissent de plus en plus lourds, signe que nos corps commencent sérieusement à fatiguer.
Une petite pause collation pour reprendre des forces et nous arrivons enfin au campement, après 6h de randonnée.
16h45, nous posons la tente comme nous le pouvons sur l'une de leur plateforme de camping prévue pour accueillir, en nombre limité, les marcheurs de la journée.
Afin de préserver au mieux la nature, le parc a installé douze plateformes légèrement surélevées du sol et quadrillées pour laisser la végétation respirer et les écureuils de terre circuler librement.
Les plateformes sont plates, ce qui est plutôt chouette pour dormir correctement, mais malheureusement adaptées qu’aux tentes autoportantes. Et la nôtre ne l'est pas, évidemment.
Si nous ne la plantons pas avec des piquets, notre tente ne tient absolument pas debout.
Mais Guigui a plus d'un tour dans son sac et sachant ça allait être compliqué de planter la tente avant de partir, il a apporté du fil de fer et réussi, avec un peu de bidouille et de démerde, à parfaitement fixer notre maison .
Pour effectuer ce trek, il est bon de savoir qu'une réservation est indispensable pour chacun des campements. En effet, le nombre de marcheurs à la journée sur le trek est limité dans cette zone protégée du parc Tombstone.
Et ce qui est chouette, c'est que des casiers métalliques sécurisés anti-ours sont mis à disposition pour y ranger nourriture et cosmétiques, eux-mêmes rangés dans des contenants hermétiques anti-ours, car pour rappel, la prudence est de mise lorsque l'on randonne au Yukon, les ours étant nombreux sur ce territoire. Une inattention peut coûter la vie.
Et pour plus de sécurité, les emplacements tente sont suffisamment éloignés de ces casiers situés juste à côté de l'abri cuisine.
Enfin, les toilettes sèches sont également installées ainsi que des réservoirs pour y déposer ses eaux sales telles que l'eau de rinçage des dents par exemple, ou encore ses restes de nourriture. Ainsi, aucune odeur ne pourra attirer un ours un peu curieux.
Bref, tout est fait pour préserver l'environnement et la sécurité des randonneurs, et c'est plutôt rassurant .
Une fois la tente montée, nous nous reposons quelques minutes avant d'aller nous laver dans le lac Grizzly.
La toilette sera très rapide, l'eau du lac étant quand même assez froide. Nous commençons à avoir l'habitude de nous baigner dans les eaux froides mais pour autant, les lacs et rivières du Yukon n'en restent pas moins très froids, trop froids pour nos corps en tout cas.
Toutefois, la baignade dans ce coin extraordinaire reste très agréable.
Nous passons notre soirée à discuter avec un randonneur français ainsi qu'un suisse et dodo à 23h30.
Jour 727 : samedi 28/07/2018
Étape 2 : Talus Lake
Distance : 12 km
Dénivelé cumulé positif : 685 mètres
Point le plus bas : 1380 mètres d'altitude
Point le plus haut : 1810 mètres d'altitude
Durée : 6h (nombreuses et longues pauses incluses)
Bien que nous étions confortablement installés, nous n'avons pas passé une bonne nuit et le réveil de 8h30 s'avère plutôt difficile.
Toutes nos affaires rangées, le petit déjeuner avalé, il est précisément 10h20 lorsque nous attaquons notre deuxième jour de trek en commençant par rebrousser chemin sur 600 mètres en direction du ruisseau Grizzly, par où nous sommes arrivés hier.
Notre premier objectif de la journée est d'atteindre le col Glissade (ou Glissade Pass en anglais). Cela signifie 400 mètres à monter, avec un sac à dos toujours aussi lourd.
Allez, on s’encourage mutuellement et on y va.
Le début de la pente se fait dans les roches, rendant le terrain un peu instable.
Puis, nous la poursuivons dans une zone davantage herbeuse, ce qui ne rend pas la montée plus facile mais l'herbe a l'avantage de ne pas glisser sous nos pieds.
Que c'est raide !!!
Nous sentons tous nos muscles brûler et notre cœur battre la chamade.
Quinze kilos sur le dos, ça fait vraiment une différence en rando !
Ascension difficile mais qui vaut la peine quand on voit les points de vue qu'elle nous offre sur le lac Grizzly.
Alors que sur le centre des visiteurs du parc annonçait deux heures pour arriver jusqu'au col Glissade, nous effectuons l'ascension de 400 mètres de dénivelé sur 1 km en seulement une heure.
Depuis que col, la vue sur le lac Grizzly et le Mont Monolith à la cime si pointue est vraiment superbe.
A ce col, malgré le vent qui souffle à 1800 mètres d'altitude, nous nous accordons une courte pause de quinze minutes, le temps d'avaler une collation et de reposer un peu nos muscles.
Une pause bien méritée et que nous estimons plus prudente lorsque nous voyons la descente de malade et inévitable qui nous attend pour nous rendre de l'autre côté de la vallée, au lac Divide.
Cette Glissade porte bien son nom. Un véritable mur de pierres qu'il nous faut descendre et nous fait quand même un peu flipper pour être honnête…
C'est dans ces moments-là qu'on se demande pourquoi nous aimons tant randonner.
C'est vrai quoi, nous venons d'en chier pour monter 400 mètres de dénivelé que nous devons redescendre aussitôt. Parfois, être randonneur c'est être un peu masochiste .
Finalement, après deux trois frayeurs, la descente se fait plutôt bien et très rapidement.
Nous adoptons la technique de la glissade en ski, mais en chaussures de randonnée plutôt qu'en skis.
Une fois que l'on trouve son équilibre et que l'on a compris la technique, la descente devient même plus amusante. Par contre, les chaussures dégustent sévèrement…
Trente minutes plus tard, nous sommes en bas dans la vallée .
Nous suivons désormais le sentier herbeux en prairie et traversons le ruisseau à plusieurs reprises pour continuer de descendre progressivement le long de celui-ci.
Quelques pierriers à traverser également mais rien de bien difficile .
Le plus dur en ce qui le concerne reste le poids du sac qui me fait souffrir aux hanches ainsi qu'aux trapèzes.
Cela fait 3h40 que nous marchons depuis ce matin. Nous arrivons au lac Divide, un des campements du trek où nous dormirons demain soir. Mais pour ce midi, nous n'y ferons qu'une pause déjeuner, sous un abri qui nous protège un peu du vent et des températures qui se rafraîchissent.
Nous y rencontrons un groupe de sept randonneurs americains et canadiens accompagné de leur guide.
Cette pause nous fait énormément de bien au physique comme au moral, le guide nous apportant tous ses encouragements pour terminer notre étape qui n'est plus très loin.
Il nous donne même quelques conseils de balade à effectuer autour du lac Talus. Vraiment sympa ce guide .
Une heure plus tard, nous reprenons notre randonnée sur un sentier relativement plat et facile à parcourir jusqu'à notre campement (seulement 130 mètres de dénivelé sur 6 km), pour mon plus grand bonheur car l'ascension de ce matin avec mon sac à dos chargé à bloc ne m'a pas épargnée. J'ai les hanches et les trapèzes en feu. Ajouté à cela le manque de sommeil de la nuit dernière, je suis épuisée.
Nous passons le col Tombstone à 1540 mètres d'altitude. Le sentier est une fois de plus bien marqué par les cairns et les fanions jaunes. Nous pouvons difficilement nous tromper de chemin.
Deux heure et vingt minutes après notre pause déjeuner au lac Divide, nous arrivons enfin au lac Talus. Il est 17h20.
Comme hier, nous avons marché 6h pour effectuer cette deuxième étape, toutes les pauses incluses.
Et alors qu'hier, les douze emplacements du campement étaient pris au lac Grizzly, aujourd'hui, nous sommes les seuls campeurs du lac Talus. Trop cool ! Nous avons un campement rien que pour nous .
Une fois la tente installée, je fais aussitôt une sieste d'une heure tant je suis épuisée. Pendant ce temps, Guigui étudie la carte et observe aux jumelles les alentours.
Je ne sais pas si c'est parce que nous sommes seuls sur le campement mais le lieu me paraît encore plus beau que le lac Grizzly .
Souper, brossage de dents et à 21h, nous vaquons chacun à nos occupations dans la tente, face aux pics de la montagne Tombstone qui donne son nom au parc.
Par moment, nous entendons des morceaux de la montagne d'en face s'effondrer. Le bruit qui résonne dans cet immense espace est assez impressionnant…
Jour 728 : dimanche 29/07/2018
Étape 3 : Divide Lake
Distance : 6 km
Dénivelé cumulé positif : 200 mètres
Point le plus bas : 1385 mètres d'altitude
Arrivée : 1540 mètres d'altitude
Durée : 1h45
Rando explo : autour de Talus lake
Distance : ~ 3-4 km
Dénivelé : ~ 200 mètres
Durée : 1h30 (+ 1h de pause)
Aujourd'hui sera une journée plus cool.
En effet, nous ne marcherons que 6 km avec nos gros sacs à dos sur le sentier plat qui mène au lac Divide, soit environ 2h de marche.
Du coup, nous nous offrons le luxe de dormir jusqu'à 9h30 ce matin et de traîner ensuite sur le camp.
La météo est au top aujourd'hui. Grand ciel bleu et soleil qui réchauffe. Le décor est encore plus beau qu'à notre arrivée hier en fin d'après-midi .
Nous sommes toujours seuls sur le campement, c'est génial !
A 11h, c'est légers et équipés de nos petits sacs à dos que nous partons explorer les alentours du lac Talus pendant deux petites heures.
La balade hors sentier mais très facile nous conduit en une heure jusqu'à ce caillou qui ressemble beaucoup à celui du Roi Lion. Oui celui où le vieux singe Rafiki présente Simba au royaume .
De ce caillou, nous avons une très belle vue sur la seule vallée qui soit baignée dans le soleil, les nuages restant accrochés sur la Cloudy Range (la chaîne nuageuse) ainsi que sur le pic Tombstone.
Également une belle vue sur Franck Rae, le plus haut sommet du parc Tombstone.
Le soleil ne cesse de briller alors nous en profitons au maximum et restons une bonne heure, assis sur le caillou de Simba, comme nous l'avons personnellement nommé, à observer ce paysage extraordinaire qui nous entoure, et à surveiller l'éventuelle faune qui pourrait roder dans le coin.
Malheureusement, nous ne voyons aucune bête. Pas un ours, pas un orignal, pas une biquette de montagne, seulement un bois de caribou juste en-dessous du caillou.
Pas d'animaux sauvages mais les montagnes raides et tranchantes qui nous entourent nous fascinent tout autant .
En trente minutes, nous sommes de retour au camp en descendant tout droit dans le lichen et quelques pierriers.
Nous sommes toujours sur ce campement alors nous en profitons pour aller nous laver un peu dans le lac.
Guigui, lui, réussit à y entrer complètement, et à deux reprises, tandis que je me contente d'avoir l'eau jusqu'aux genoux.
Ce n'est pas l'envie qui m'en manque mais l'eau, bien que sublime et absolument transparente, est bien trop froide pour moi pour songer y prendre un bain ne serait-ce qu'une petite minute.
En réalité, j'apprécie d'autant plus le séchage au soleil que la baignade .
Un peu après 16h, nous prenons un rapide déjeuner et à 17h, nous quittons le campement de Talus Lake, sous un soleil de plomb.
Les gros sacs (mais toutefois allégés) sur le dos, nous marchons 1h45 sur terrain plat pour nous rendre jusqu'au campement de Divide Lake.
La encore, nous sommes les seuls campeurs et à presque 19h, il y a des chances pour que nous le restions. Nous sommes vraiment chanceux d'avoir un campement rien que pour nous .
Cette journée de “repos” nous a fait beaucoup de bien et nous a permis de récupérer un peu physiquement.
Tâchons désormais d’avoir une bonne nuit de sommeil car demain il nous faudra être en super forme pour remonter le col Glissade que nous avons descendu hier et retourner ensuite au lac Grizzly, à 6 km de là.
Jour 729 : lundi 30/07/2018
Étape 4 : Grizzly Lake
Distance : 6 km
Dénivelé cumulé positif : 485 mètres
Départ
; mètres d'altitude
Arrivée : … mètres d'altitude
Durée : 3h40 (nombreuses et longues pauses incluses)
Rando explo : Twin Lakes + Monolith Mountain View Point
Distance : 5 km en aller-retour
Dénivelé : 600 mètres
Durée : 3h (pauses incluses)
C'est un peu avant 10h et sous un soleil de plomb que nous quittons le campement de Divide Lake ce matin, et en plutôt bonne forme. La journée de “repos” d'hier nous a fait beaucoup de bien, c'est certain, et le sac qui s'allège fait également notre bonheur .
Nous partons à vive allure, si bien que nous arrivons au pied du col Glissade en seulement 1h20 de marche.
Si sa descente il y a deux jours était moins difficile que nous le pensions, remonter jusqu'en haut du col est une autre paire de manches, et peut-être même de chaussures…
Ce sont 400 mètres bien raides dans des cailloux très glissants que nous devons gravir pour arriver jusqu'en haut et retrouver le lac Grizzly.
Quand nous repensons à quel point la descente avait été glissante (mais tout à fait faisable), nous angoissons un tantinet la remontée, la pensant même impossible.
Allez, c'est parti. Affrontons cette ascension de malheur !
Les deux premiers tiers se grimpent relativement facilement malgré la côte qui nous prend beaucoup d'énergie et nous brûlent tous nos muscles.
En revanche, le dernier tiers de l'ascension est un enfer.
La montée se transforme en véritable cheminée, bien plus raide et plus glissante encore.
Il n'y a pas un seul caillou qui tient sur la montagne. Les petits comme les plus gros glissent à mesure que nous posons nos pieds dessus.
C'est à quatre pattes que nous tentons bien que mal d'arriver jusqu'en haut.
À plusieurs reprises je me fais de belles frayeurs jusqu'à me provoquer une crise de panique. Ma respiration s'accélère, je commence à pleurer, j'ai peur.
Faut dire que je fais un pas en avant, trois pas en arrière. Je glisse tellement qu'il m'est impossible de rejoindre Guigui, pourtant situé à quelques pas devant moi. Je m’accroche à un gros rocher pour tenter de me calmer mais même un rocher de cette taille ne tient pas sur cette fichue montagne. Il glisse, m’entraînant avec lui.
Je me raccroche comme je peux à un autre rocher, plus petit et plus stable.
Je réussis à rejoindre Guigui, complètement découragée et affaiblie.
Je n'y arriverai pas, pas avec ce gros sac sur le dos qui me bloque dans tous mes mouvements.
Guigui s'en va donc déposer son sac à dos en haut du col qui n'est plus très loin, me laissant seule à ce rocher qui, je l'espère, ne va pas se casser la gueule, en attendant que Guigui revienne récupérer mon sac pour me soulager et me permettre de poursuivre l'ascension avec davantage d'aisance articulaire.
Guigui est convaincu que j'y arriverai mieux sans mon sac qui me handicape et m'empêche d'avancer.
Tête de con que je suis, cela m'embête que Guigui se tape deux aller-retour jusqu'au col avec un sac lourd sur le dos alors le voyant grimper sans trop de difficulté, je décide de continuer encore un peu cette ascension, ainsi il aura moins à faire avec mon sac à dos quand il me rejoindra.
Mais évidemment, je me retrouve à nouveau dans un éboulis hyper glissant, emportant le reste de mon énergie avec lui.
Tout le terrain sous mes pieds est instable. Je glisse et n'ayant plus du tout de force dans les jambes, je crie de panique, appelle Guigui à l'aide, qui est presque arrivé au col. Je me vois déjà dévaler toute la montagne et arrêter ma chute 300 mètres plus bas.
Je ne sais par quel miracle, je réussis à sortir mes pieds de cette zone qui se casse la gueule et à les poser sur une pierre beaucoup plus stable.
A ce moment précis, j'ai eu tellement peur que j'ai imaginé le pire, qu’un accident grave allait arriver.
Guigui arrive en deux temps trois mouvements jusqu'à moi. Je pleure, lui dis que je l'aime et que je ne veux pas mourir ici.
Ça peut sembler très ridicule mais c'est réellement ce que je ressens à ce moment-là.
Guigui se montre très rassurant en m'affirmant que je viens de passer la zone la plus difficile, et que désormais, ça ne va plus être très long jusqu'au col, surtout s'il porte mon sac.
“Puce, tu en es capable, j'te jure que le plus dur est derrière”, me dit-il.
En effet, les derniers cent mètres se grimpent bien plus vite et facilement et nous arrivons enfin au col, sains et saufs.
Une pause s'impose !
Blottie contre mon amoureux, je me repose et reprends tranquillement mes esprits et mes forces à l'aide de quelques collations.
Au total, cela nous aurait pris 1h pour remonter cette “glissade”, une ascension de taré que je trouve quand même assez dangereuse. C'est même surprenant qu'il n'y ait pas d'autres passages à emprunter sur ce trek pourtant balisé.
Nous restons une bonne demie-heure au col à nous reposer. A présent, nous voyons notre objectif final, le lac Grizzly sous un beau soleil.
Il y a deux jours, le sentier entre le lac Grizzly et le col Glissade était bien raide à monter. Il l'est tout autant à redescendre.
Toutes ces émotions ressenties ont bouffé toute mon énergie, si bien que je descends vraiment très lentement jusqu'au campement du lac Grizzly, telle une mamie aidée d'une canne. Je suis incontestablement vidée, épuisée.
Je ne sais d'ailleurs pas comment mes pieds arrivent encore à avancer. Certainement une incroyable prouesse mentale.
Même Guigui est surpris de me voir marcher si lentement !
14h05, nous arrivons enfin au camp. Hallelujah !
Cela nous a pris cinquante minutes pour tout redescendre.
Vite vite, il faut que je mange ! Je sens mon corps partir en hypoglycémie, ça craint ! Pour autant je n'en suis pas surprise car je sais que j'ai un métabolisme qui brûle énormément de calories, et il est clair que je n'ai pas assez mangé pour les efforts que j'ai fournis.
C'est l'ennui quand on randonne avec un Guigui qui ne ressent jamais la faim...
Cela fait déjà deux heures que nous sommes au camp. Le temps passe drôlement vite ! Nous avons mangé, la tente est montée, nous sommes un peu reposés.
À présent que je me sens rassasiée et bien reposée, nous repartons à 16h, les sacs plus légers remplis uniquement de collations, d'eau, de nos vestes et des jumelles bien sûr, pour explorer les environs du lac Grizzly.
La randonnée de 5 km en aller-retour, de niveau modérée et nommée Twin Lakes and Monolith Mountain View Point part du campement du lac Grizzly et est supposée prendre trois heures de marche.
Le sentier, balisé de cairns et de fanions verts, suit un ruisseau menant vers deux crêtes.
Nous suivons donc l'une de ces crêtes qui, quand on prend un peu de hauteur, nous offre un joli premier point de vue sur un tout petit lac peu profond.
En chemin, nous rencontrons le groupe de randonneurs accompagnés de leur guide, rencontré au lac Divide lors de notre pause casse-croûte il y a deux jours.
Pour eux aussi, l'ascension du col Glissade a été très difficile. Cela me rassure un peu.
Nous poursuivons toujours sur la crête et passons le col Grizzly à 1616 mètres d'altitude.
Du col, nous avons de beaux points de vues panoramques sur la vallée de Fern Creek.
Nous continuons encore et toujours notre ascension le long de la crête caillouteuse jusqu'au point de vue sur les Twin Lakes, pas vraiment jumeaux d'ailleurs, et sur le Mont Monolith.
Quand nous l’observons plus attentivement, il nous inspire un gros doigt d'honneur. Pas très sympa le Monolith…
Au total, ce sont environ 600 mètres de dénivelé que nous grimpons en moins de 3 km, comme si nous n'en avions pas assez fait pour aujourd'hui…
Cela nous prend exactement 1h25 pour nous rendre jusqu'au point de vue, où nous y restons une bonne demie heure à observer le paysage et la faune potentielle.
Une heure de descente plus tard, nous sommes de retour au camp, contents de nous décrasser un peu dans le lac et d'avaler un repas copieux pour le souper.
Toute la journée, je n'aurais pensé qu'à manger !
Et ce soir, nous nous en mettons plein la panse .
Cette nuit sera la dernière sur ce trek, demain étant consacré au retour jusqu'au van que nous avons hâte de retrouver pour des nuits confortables.
La journée d'aujourd'hui aura été certes splendide mais surtout difficile.
Mais Guigui et moi formons une bonne équipe et quand l'un de nous commence à flancher, l'autre n'est jamais très loin pour le relever .
Jour 730 : mardi 31/07/2018
Étape 5 : retour au parking
Distance : 12 km
Dénivelé : 350 mètres
Point le plus bas : 920 mètres d'altitude
Point le plus haut : 1715 mètres d'altitude
Durée : 5h15 (pauses incluses)
Comme la plupart du temps lorsque nous dormons en tente, la nuit a été plutôt mauvaise. Il va vraiment falloir investir dans de nouveaux matelas de camping plus confortables, d'autant que nous campons quand même régulièrement.
Ce matin, nous roupillons donc jusqu'à 9h et à 10h45, nous sommes fins prêts pour notre dernière étape du ce trek on ne peut plus sportif.
Sans le faire exprès, nous partons exactement à la même heure qu'à l'aller mais parcourons ces 12 km retour bien plus légers qu'en partant et accompagnés d'un soleil brillant et bien présent .
Les pierriers traversés à l'aller sont toujours là et le sentier ne fait que monter et descendre progressivement pour une bonne partie de la randonnée.
Les chemins en balcon nous reposent les jambes et nous apprécions d'autant plus les prairies, cette fois-ci baignées dans le soleil (à l'aller, elles étaient sous quelques gouttes de pluie).
Et les marmottes sont toujours au rendez-vous, prêtes à poser pour la photo .
Nous retrouvons ensuite le plateau sur lequel nous avons fait cette merveilleuse rencontre avec Monsieur le Caribou lors d'une pause casse-croûte.
Nous y prenons une nouvelle fois notre déjeuner mais sans les animaux cette fois-ci.
En voyant les gros nuages sombres s'amonceler derrière nous, nous ne faisons pas de vieux os comme on dit et reprenons rapidement notre marche.
Les nuages resteront derrière nous pour le reste de l'étape car bien que la pente que nous avons grimpée en début de trek il y a cinq jours nous paraissait très raide (nous étions en sueur et pas mal essoufflés), aujourd'hui, avec les sacs bien plus légers, cette même pente se descend sans peine et assez rapidement.
Seuls les derniers kilomètres à parcourir dans le bois nous paraissent longs mais c'est peut-être parce que nous en avons plein les jambes et qu'il n'y a plus de points de vue à observer…
Alors que cette étape nous avait demandé 6h de marché à l'aller, nous l'effectuons en 5h15 pour le retour.
Il est 16h et nous sommes de retour à la voiture.
Nous prenons aussitôt la route en direction du centre des visiteurs qui ferme à 17h pour y rapporter les deux boîtes anti-ours et récupérer notre caution de 120$ pour la location de celles-ci.
Nous hésitons à rester une nuit de plus dans ce superbe parc Tombstone pour y effectuer demain une dernière randonnée tant nous avons soif d'exploration, les possibilités étant plus que nombreuses sur ce terrain de jeux infini.
Mais il semblerait que nos corps prennent le dessus sur nos esprits et décident à la place de la tête qui les tient de clore aujourd'hui notre séjour dans le parc sur ce sentier Grizzly Lake, un trek certes difficile par moment mais de toute beauté.
Nous sommes très contents d'avoir parcouru ces sentiers et d'avoir pris le temps d'explorer au-delà des étapes.
Sans compter que nous avons eu droit à une très belle météo quasiment tout le temps de notre séjour dans le parc Tombstone.
Dix jours de randonnée ensoleillés et fantastiques, certainement l'un de nos plus beaux souvenirs au Yukon.
Il est temps à présent de poursuivre notre road trip de l'été 2018 et de profiter pleinement de notre visa touriste canadien .
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